Dans les années 1950, certains membres du clergé encouragent la construction de "chapelles de secours " provisoires, démontables et transportables, adaptées aux mutations urbaines et aux évolutions liturgiques de l’époque. Manifestant un vif intérêt pour les expérimentations menées en ce sens, Jean Prouvé s’engage dans la conception d’un prototype d’église nomade, peu cher et rapide à monter. Salué en 1958 dans la revue L’art sacré, le caractère novateur du projet retient l'attention du diocèse de Metz qui souhaite équiper de nouveaux quartiers construits dans les années 1950 à Forbach, Behren-lès-Forbach et Creutzwald. Le principe constructif étant arrêté, Eugène Voltz, Architecte des Bâtiments de France d’origine strasbourgeoise, se voit attribuer la commande des plans pour le dossier de permis de construire, qu’il conçoit en étroite collaboration avec l’architecte mosellan Charles Sommermater. A l’instar des églises du Christ-Roi de Bellevue et Notre-Dame de Fatima de Creutzwald, l'église Notre-Dame est construite en quelques mois. Les travaux, supervisés par l’Association Notre-Dame de Metz, débutent en 1960 et s’achèvent l’année suivante.
Conseillée en 2009 par le CAUE sur la reconversion du lieu de culte en bibliothèque, la commune de Behren-lès-Forbach engage la réalisation de ce projet en sélectionnant en 2010 une équipe de maîtrise d'œuvre composée notamment de Benjamin Fedeli et Vincent Toffaloni, architectes. Initiés en juin 2012, les travaux prennent fin en automne 2014. La bibliothèque est inaugurée le 3 mars 2015.
L’édifice s'inscrit dans un plan rectangulaire (9 x 36 mètres) à vaisseau unique, couvert d’une toiture à deux pans évoquant le motif biblique de la tente de la communauté. La charpente métallique, destinée à être facilement démontable et transportable, soutient et met en tension deux grands panneaux rectangulaires composés de plateaux de bois de type « Rousseau », solidarisés entre eux. Ces plateaux ont la particularité d'être autoportants et isolants. Le système structurel initialement défini par Jean Prouvé prévoyait de les employer également pour réaliser les murs pignons. Cependant, E. Voltz et C. Sommermater choisissent de maçonner ces dernier avec des moellons de grés rouge appareillés et de surélever la toiture pour ajouter des salles annexes en sous-sol. Charles Sommermatter explique : " Nous avons pris soin d'adapter les soubassements de telle sorte que l'aspect prismatique de la structure soit maintenu. (...) les lignes fuyantes des portiques en acier ont été prolongés par des arcs boutants en béton armés sur lesquels ils s'adossent." Ainsi, la toiture repose sur les murs extérieurs en maçonnerie de moellons, renforcés par des contreforts en béton. L'unité spaciale intérieure et la sobriété de la nef, libre de tout élément porteur, sont mises en valeur par la lumière naturelle distillée par une série de bandeaux vitrés, disposés en pied de couverture, et une ouverture continue au niveau du faîtage.
Pour sa reconversion en bibliothèque, B. Fedeli et V.Toffaloni ont préservé la charpente métallique de Jean Prouvé et les qualités spatiales de la nef en tenant compte des exigences de performances énergétiques actuelles et des besoins liés aux activités de l'équipement (accueil du public, laboratoires de langue, lieu d'animation - heure du conte, rayonnages). Le sarking - isolation thermique rapportée par l'extérieur en toiture - laisse la charpente apparente. De discrets entraits métalliques la renforcent pour reprendre cette charge supplémentaire. La fluidité spaciale de la nef est préservée par la création de petits volumes indépendants accueillant les fonctions de la bibliothèque, dissociés des parois extérieures à cet effet. Associée aux rayonnages, leur implantation dessine un parcours destiné à rompre avec l'axialité d'origine, centrée exclusivement sur l'autel. Enfin, pour ouvrir cet espace intialement introverti sur la ville, les bandeaux latéraux sont transformés en fenêtres et l'éclairage zénital est renforcé.
LEBRUN Pierre, Le temps des églises mobiles. L'architecture religieuse des Trente Glorieuses, Gollion, éd. In Folio, 2011, 345 p.
« Détruisez le temple ! », L’art sacré, n°9-10, 1958.
La Maison de l’Architecture de Lorraine (pdf)
http://www.urcaue-lorraine.com/construction.php?id=115
http://ruraleurope.org/Article/P45/ProjP45/Behren.pdf
Consacrée en 1961, l'église Notre-Dame de Behren-lès Forbach est l’une des trois églises nomades construites en Moselle suivant le procédé constructif mis au point par Jean Prouvé. Elle constitue un témoignage unique de l’engagement de certains membres de la communauté religieuse en faveur d’églises plus modestes, démontables et transportables, destinées à répondre à l’urbanisation accélérée que connaît la France à cette époque.
Restaurée et restructurée pour accueillir la bibliothèque municipale, elle illustre également la problématique du devenir des lieux de cultes désaffectés et de leur reconversion à des usages laïcs.
Reconstruction et Trente Glorieuses (1945-1975)
XXIe siècle (2000-...)
- Association diocésaine (Construction de l'église)
- Commune de Behren-lès-Forbach (Reconversion de l'église)
- Charles SOMMERMATTER Architecte/construction de l'église
- Eugène VOLTZ Architecte des Bâtiments de France/construction de l'église
- Benjamin FEDELI AUP Lorraine Architecte mandataire/reconversion de l'église
- Atelier d'architecture Vincent Toffaloni Reconversion de l'église
- Jean PROUVÉ (Ingénierie charpente métallique de l'église)
- TECC (Bureau d'études technique/Reconversion de l'église)
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