Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la France voit sa société et son paysage se transformer. L’État, puissant et interventionniste, se lance dans une ambitieuse politique de construction afin d’améliorer un parc de logements vétuste et insuffisant.
Ces orientations nationales s’accordent parfaitement avec les souhaits du maire de Nancy, Raymond Pinchard. La ville détient alors sur son plateau nord-ouest un immense terrain, que l’urbaniste Charles Delfante juge propice à l'aménagement d'un grand ensemble. L'architecte Bernard Zehrfuss est chargé du projet dont le chantier commence en 1958. Lors de son achèvement en 1967, le quartier connaît un franc succès.
A peine quinze ans plus tard, l'ensemble commence à muter socialement suite au départ des ménages les plus aisés vers les quartiers pavillonnaires. Les conditions de vie se dégradent progressivement. L'architecte Alain Sarfati est mobilisé pour de premières modifications, en 1981. Cependant, les problèmes perdurent et un nouveau réaménagement est engagé dans les années 2000. L’atelier de l’urbaniste-architecte Alexandre Chemetoff requalifie les espaces urbains en procédant notamment à d'importantes destructions. Les trois tours en étoile disparaissent et la plus longue barre, le Cèdre bleu, est amputée. Ces évolutions sont prolongées par le développement d'un nouveau quartier de logements sur le terrain voisin du Plateau de Haye avec pour objectif de favoriser la mixité sociale de ce secteur de Nancy.
Le quartier du Haut du Lièvre prend place à l'écart de la ville ancienne, sur un vaste plateau formant un promontoire au nord-ouest de Nancy. Bernard Zehrfuss dessine un grand ensemble empreint d’une certaine monumentalité. L'épine dorsale du quartier est constituée de deux barres, le Cèdre bleu et le Tilleul argenté. La première, citée à l'époque comme la plus longue d'Europe (400 mètres), est haute de 13 étages ; la seconde (300 m) est un peu plus élevée avec 15 étages. Le positionnement de ces deux barres dans le prolongement l'une de l'autre accentue le caractère linéaire de la composition, fermée initialement aux extrémités par trois tours en étoile et complétée par trois barres orientées nord-sud. Au total, l'ensemble compte 3 500 logements, destinés à accueillir 12 500 habitants.
A la rencontre des deux barres, l’architecte dispose le cœur social du quartier, constitué d’équipements sociaux, sportifs et commerciaux. Une église, réalisée par l'architecte Dominique-Alexandre Louis, complète ces aménagements.
Cet état initial a profondément évolué à partir des années 1980. Le travail d’Alain Sarfati a notamment porté sur une requalification des entrées afin de leur ôter leur impersonnalité originelle. L’intervention d’Alexandre Chemetoff est plus franche avec la destruction des trois tours en étoile, remplacées par des logements plus bas, souvent bardés de bois, et l’amputation du Cèdre bleu. Le tronçon de la barre abritant la chaufferie est maintenu et prend le nom de « Tour de l’énergie ».
DESMOULINS Christine, Bernard Zehrfuss, Paris : Editions du Patrimoine, Coll. Carnets d'architectes, 2008.
ABRAM Joseph, L'architecture moderne en France, Paris : Picard , 1999
MASSE Gaël, Le Lièvre, le castor et les trois Christophe, conte du Haut-du-Lièvre, Nancy : Ville de Nancy, 2009 (en ligne).
Perché sur les hauteurs de la ville et visible de tous, le grand ensemble du Haut-du-Lièvre marque fortement le paysage urbain de Nancy. A l’échelle nationale, il représente un témoignage marquant de la politique urbaine des Trente Glorieuses. Il a été réalisé par l’architecte Bernard Zehrfuss, auteur de nombreux édifices remarquables comme le CNIT à La Défense ou le Siège de l’UNESCO à Paris.
Reconstruction et Trente Glorieuses (1945-1975)
- Commune de Nancy
- Office Public d'Habitations à Loyer Modéré (OPHLM) de Nancy
- Compagnie immobilière pour le logement des fonctionnaires
- Bernard ZEHRFUSS Architecte
- Charles DELFANTE Urbaniste
- Alain SARFATI Architecte
- Alexandre CHEMETOFF Architecte urbaniste
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